Bac Philo 2023 - Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ?
Sujet présenté par Jacques Morhan
Voilà une question complexe qui fait appel à de nombreuses situations. Nous éviterons la multiplication de celles-ci afin de faire simple.
Que souhaitent les hommes quand ils veulent la paix ? c’est d’abord de sortir des situations de conflit, d’affrontement et d’hostilité. Ce qui suppose un retour à la tranquillité, à la sécurité. Est-ce toujours le cas ? oui et non.
Cette cessation des hostilités se fait -elle dans la justice ? L’histoire montre que ce n’est pas toujours le cas. Car une paix véritable n’existe que si elle a été pensée en rapport avec la justice et la liberté.
La force ne fait pas le droit
La guerre par exemple, est par définition un rapport de force dans un conflit entre des parties qui n’ont pas voulu ou pas pu, régler un désaccord par un autre moyen. Comme l’explique Carl Clausewitz « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens». Pour lui la guerre c’est l’échec de la diplomatie. Et il ajoute» il ne faut donc pas renoncer à faire de la politique ». en effet c’est vital
L’issue de la guerre implique souvent la soumission de l’un des belligérants. La situation qui en découle n’est pas forcement juste pour la partie défaite (la France après la guerre de 70 ou l’Allemagne après le traité de Versailles) car comme le formule Jean Jacques Rousseau» la force ne fait pas le droit» ni donc la justice.
Légalité, légitimité et justice
A l’inverse la paix suppose une situation où les parties prenantes s’accordent pour régler le conflit qui les oppose, autrement que par la force. Attention : l’état de paix ne signifie pas qu’il n’y ait plus aucun désaccord mais qu’il existe des procédures reconnues par tous pour arbitrer les différents.
Ainsi la paix semble à priori correspondre à une situation que l’on peut considérer comme juste puisque les décisions prises dans ce cadre se font selon des règles acceptées. Pour cela il faut qu’il y ait concordance entre légalité, légitimité et justice.
En ce sens vouloir la paix, parait bien correspondre à une volonté de justice. C’est le cas en général des règlements qui se font sous l’égide de l’ONU dont hélas les interventions sont trop rares, faute souvent d’accord dans le cadre du Conseil permanent de Sécurité.
Légitimité des guerres de libération
Quant à la volonté de justice, elle s’exprime concrètement à travers le refus de l’injustice, les combats contre les privilèges car la conflictualité est aussi hélas inscrite au cœur de l’histoire des sociétés humaines et de leur vie sociale. En effet la paix civile peut aussi occulter une situation structurelle d’injustice (lutte de classe, colonisation etc.) JJ Rousseau ne dit pas autre chose quand il fait remarquer que la préservation de l’ordre social peut parfois s’accommoder du maintien d’injustice flagrante.
Enfin l’entrée en guerre peut parfois correspondre à une volonté de justice. Dans le Prince, Machiavel dit que » la guerre est toujours juste lorsqu’elle est nécessaire » et il ajoute » les armes sont sacrées lorsqu’elles sont l’unique ressource des opprimés ». Machiavel révolutionnaire, non pas jusque-là, mais son propos nous renvoie aux justes guerres de libération par exemple au combat de la résistance française.
Conclusion
L’idéal est bien sur la paix perpétuelle telle que le souhaite Emmanuel Kant en rendant la guerre impossible parce que c’est la finalité de la raison universelle.
Ainsi la volonté de justice s’exprimerait tour à tour à travers l’exigence de la reconnaissance des droits universels et l’exigence également de traitements de tous les hommes de manière équitable.
Mais soyons réalistes avec Clausewitz pour qui la guerre est l’échec de la paix perpétuelle que préconise Kant. Pour le théoricien militaire prussien il ne faut donc pas renoncer à faire de la politique.
Vouloir la paix, c’est travailler à plus de justice à travers la vie politique c’est-à-dire au sein du seul conflit qui vaille, le débat démocratique.
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